Je reviens de 2 ans de congé de présence parentale (AJPP pour m’occuper de mon enfant gravement malade). Je suis commerciale, cadre au forfait jours. Cela fait 5 ans que je suis salariée de l’entrprise. Tous les commerciaux de mon entreprise ont droit à 3 jours de télétravail par semaine.
A mon retour de congé parental le 5 septembre, mon employeur m’indique que je n’ai plus droit au télétravail le temps de redevenir autonome sur mes comptes clients et de finir ma « remise à niveau » (formation interne). J’habite à 1h30 de route de mon lieu de travail, je lui dis donc que 3 fois par semaine je vais devoir quitter mon poste vers 16h30 pour aller chercher mon fils à la crèche. Mon employeur refuse en me disant que cela va désorganiser le service et que je dois être totalement disponible pendant ma formation. Il me propose de me passer à temps partiel, c’est-à-dire de finir tous les jours à 16h en contrepartie de quoi il s’engage à réduire mon portefeuille clients… et mon salaire de 30% ! Je refuse de signer l’avenant proposé et propose à la place qu’ils me prennent 5 jours de congés payés. Je finis donc à 16h tout le mois de septembre, ils me prennent 5 CP en contrepartie, mais nous n’avons signé aucun avenant en ce sens.
Maintenant mon employeur veut prolonger de 1 mois supplémentaire la situation sur les mêmes modalités car il estime que je ne suis toujours pas autonome sur mes comptes clients. Il m’a envoyé un mail en indiquant ses attentes et en me disant que chaque mois on fera le point pour voir si je suis apte à reprendre le télétravail. Il m’indique toutefois que je dois être présente aux soirées clients et autres évènements organisés le soir par mon entreprise car cela est nécessaire pour l’activité du service.
Je suis perdue quant à mes droits ; suis-je en droit d’exiger le même traitement que les autres salariés et retrouver du télétravail 3 jours par semaine ? Jusqu’à quand l’employeur peut prolonger la situation? Peut-il m’imposer de venir aux soirées clients alors que je finis à 16h et qu’il m’a pris mes congés en ce sens ? Rien n’est écrit, c’est tacite entre nous, que dois-je exiger par écrit ? Je ne veux pas/peux pas perdre 30% de mon salaire mais je ne sais pas si prendre 5 CP par mois pour justifier de finir à 16h est légal…
Je précise qu’il existe une charte télétravail en interne qui indique que mes managers sont en droit de décider qui peut bénéficier du télétravail ou non.
accord du 13 janvier 2023 relatif au télétravail :
Réversibilité
Le télétravail régulier est réversible. L’employeur et le salarié peuvent mettre fin à la situation de télétravail en respectant un délai de prévenance d’au moins 15 jours calendaires, sauf commun accord des parties déterminant un délai plus court. En cas de changement de poste, la demande de télétravail régulier fait l’objet d’un réexamen par le responsable hiérarchique.
Si le télétravail ne fait pas partie des conditions d’embauche, l’employeur et le salarié peuvent, à l’initiative de l’un ou de l’autre, convenir par accord d’y mettre fin et d’organiser le retour du salarié dans les locaux de l’entreprise, dans l’emploi tel qu’il résulte de son contrat de travail. Les modalités de cette réversibilité sont établies par accord individuel et/ ou collectif.
Si le télétravail fait partie des conditions d’embauche, le salarié peut ultérieurement postuler à tout emploi vacant, s’exerçant dans les locaux de l’entreprise et correspondant à sa qualification. Il bénéficie d’une priorité d’accès à ce poste.
L’article L1225-55 du Code du travail impose à votre employeur de vous réintégrer dans votre emploi ou un poste similaire avec une rémunération équivalente, ce qui est respecté.
Au sujet du télétravail, votre employeur dispose effectivement d’une marge de manœuvre. La charte interne qui confie aux managers la décision d’octroyer le télétravail est juridiquement opposable. Plus important encore, la motivation donnée (« remise à niveau » et « retrouver l’autonomie ») constitue une justification organisationnelle objective conforme à l’article L1222-9 du Code du travail.
Concernant l’arrangement tacite que vous avez conclu, celui-ci pose un problème juridique. Finir quotidiennement à 16h contre la prise de 5 jours de congés payés constitue une modification de vos conditions de travail qui devrait faire l’objet d’un avenant écrit. L’absence de formalisation vous expose à des difficultés si l’employeur change d’avis.
S’agissant de vos obligations réelles, en tant que cadre au forfait jours, vous n’avez pas d’horaires fixes mais devez respecter les repos légaux (11h quotidiennes, 35h hebdomadaires). L’exigence de présence aux soirées clients alors que vous terminez à 16h est contradictoire et peut être contestée.
Quant à la durée de cette situation, l’employeur ne peut prolonger cette période de formation indéfiniment sans critères objectifs d’évaluation. Vous pouvez légitimement demander quels sont les indicateurs précis de votre « autonomie retrouvée ».
Vos actions prioritaires : Obtenez par écrit la formalisation de vos conditions actuelles et les critères d’évaluation de votre formation. L’employeur agit dans son droit mais reste soumis aux règles du Code du travail.